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Atteinte de la CSU : la France doit concrétiser ses engagements pour la santé mondiale dans les pays les moins avancés

By 12 décembre 2023No Comments

Alors que nous célébrons aujourd’hui la journée internationale de la couverture sanitaire universelle (CSU), plus de la moitié de l’humanité n’est toujours pas entièrement couverte par les services de santé essentiels. A mi-chemin des objectifs de développement durable (ODD), sans actions concrètes, durables et équitables de la communauté internationale en faveur de la santé mondiale, nous n’atteindrons pas la réalisation du 3e ODD d’ici 2030. Avec l’adoption récente de nouveaux cadres et orientations stratégiques pour la politique française de solidarité, nous attendons des mesures concrètes et ambitieuses de la France en ce sens dans les pays les plus vulnérables.

Dans son dernier rapport, le constat de l’OMS est sans appel : depuis 2015, les progrès réalisés pour mettre en œuvre la couverture sanitaire universelle stagnent, tandis que la proportion de la population confrontée à des niveaux catastrophiques de dépenses de santé directes (soit le coût des soins de santé qui repose sur les usagers) ne fait qu’augmenter depuis 20 ans. L’Afrique, qui concentre la majorité des pays les moins avancés (PMA), recense les indicateurs sanitaires parmi les plus faibles au monde, avec des taux de mortalité infantile et maternelle particulièrement élevés. Le fardeau du VIH/Sida, de la tuberculose et du paludisme continue de peser lourdement dans la région, qui enregistre la grande majorité des décès attribuables au VIH ainsi qu’au paludisme. Face à cela, la disponibilité, l’accessibilité et la qualité des soins et services de santé continuent d’être largement insuffisantes pour répondre aux besoins des populations. En moyenne, l’indice de couverture des services de santé qui prend en compte l’ensemble des services de santé les plus essentiels n’est que de 45 sur 100 dans les PMA contre 80 dans les pays à haut revenu.

La pénurie mondiale d’agent·e·s de santé est particulièrement alarmante : d’après les dernières données disponibles de la Banque mondiale, on compte en moyenne 0.3 médecins et 0.8 infirmier·e·s et sages-femmes pour 1000 habitants dans les PMA contre respectivement 3.2 médecins et 11.3 infirmiers et sages-femmes dans les pays à haut revenu. En d’autres termes, alors que l’OMS recommande d’assurer a minima 2.5 personnels médicaux pour 1 000 habitants pour réaliser les interventions de santé les plus essentielles, on compte en moyenne 1.1 personnels de santé pour 1000 habitants dans les PMA contre 14.5 dans les pays à haut revenu. D’après la Banque africaine de développement, un tiers des Africains vivent à plus de deux heures de route d’un service de santé, et de graves pénuries existent en termes de lits d’hôpitaux, d’équipements médicaux et de médicaments. En outre, à peine la moitié des centres de soins de santé primaire existant en Afrique subsaharienne auraient accès à l’eau potable ou à une énergie électrique fiable.

Si nous n’agissons pas rapidement pour améliorer la couverture des services de santé primaires et assurer un accès équitable de chacun aux soins de santé essentiels dans les pays les moins avancés, nous n’atteindrons pas la réalisation de la CSU d’ici 2030. En septembre dernier, la communauté internationale se réunissait sous l’égide des Nations unies pour adopter une nouvelle Déclaration politique en faveur de la réalisation de la CSU. Cette dernière engage les chefs d’État et de gouvernement à “prendre des mesures fondamentales pour renforcer les investissements essentiels, la coopération et la solidarité internationales au plus haut niveau politique en faveur de la CSU”. Pour être effectifs, ces engagements doivent se traduire par des décisions budgétaires et politiques concrètes.

Actrice historique dans le domaine de la santé mondiale, la France doit prendre sa part et continuer d’œuvrer en faveur de l’atteinte de la CSU. En 2021, la santé ne constituait que 13% des financements versés par la France aux pays les moins avancés, et ces derniers ne recevaient que 11% de l’aide publique au développement française bilatérale. L’adoption récente de nouveaux cadres stratégiques et politiques en matière de solidarité internationale et de santé mondiale doit venir renforcer les efforts actuellement fournis. En effet, le dernier Comité interministériel pour la coopération et le développement international (CICID) a fixé pour objectif d’accroître progressivement le soutien de la France auprès des PMA “en assurant un effort financier de l’Etat d’au moins 50% pour les PMA dès 2024” ainsi qu’en menant un plaidoyer en faveur de cette cible dans les enceintes multilatérales concernées. Le comité a par ailleurs réaffirmé la santé mondiale comme l’une de ses 10 priorités thématiques, ciblant particulièrement “le besoin de renforcer la résilience face aux risques sanitaires, d’accroître l’investissement dans les systèmes de santé primaires et d’améliorer la formation des soignants dans les pays fragiles”. Enfin, ces axes prioritaires sont soutenus par une nouvelle stratégie de la France en santé mondiale (2023-2027) qui place la promotion des systèmes de santé équitables, pérennes, résilients, adaptatifs et centrés sur la personne, au cœur de ses priorités pour atteindre la couverture sanitaire universelle (CSU).

Nous appelons désormais la France à ce que la déclinaison de ces axes prioritaires se traduise de manière concrète en :

  • Renforçant la part de dons dans son aide publique au développement (APD) afin de davantage soutenir les PMA et les secteurs sociaux
  • Dédiant a minima 50% de son APD aux PMA
  • Consacrant 15% de son APD à la santé mondiale
  • Intégrant la santé parmi les priorités des futures stratégies nationales de la politique de solidarité internationale de la France, et ce particulièrement dans les PMA.